top of page
P1080676.JPG
12 Plaisir d'essence
00:00 / 04:22

Plaisir d'essence 

Au village, notre poste à essence

Luit depuis le début des vacances,

Brillant du socle jusqu’au tuyau :

Serait-ce pour attirer les autos ?

Mais dédaigne les limousines,          

Monospaces, quat’quat’, grosses berlines.

S’il scintille ainsi de mille feux         

C’est qu’il est amoureux.

D’une petite japonaise          

Avec ses phares de braise,

Ses enjoliveurs chromés

Et son pare-brise teinté.

Le cliquetis de son moteur

Lui affole le compteur ;

Ça le sort de l’ordinaire :

C’est super quand il la sert.

 

 

Tout l’été, c’est lui qu’elle avait choisi.

Roulant d’la caisse sur son joli châssis,

Ses pneumatiques bien gonflés,

Parfois même la capote baissée.

Il distinguait de loin son Klaxon.

Mais à peine revenu l’automne,

Elle par contre n’est pas revenue :

Il sanglote, très ému.

Sur sa petite japonaise

Qui le mettait tant à l’aise,

Dont la belle carrosserie

Rechargeait ses batteries,

Mais dont le lâche abandon

A mis son cœur en hayon.

S’il regarde dans le rétro     

Il maudit son manque de pot.

 

 

Qu’y a-t-il de plus fort qu’un bel amour ?

Elle réapparait aux premiers beaux jours.

Candide en sa robe immaculée

Comme s’il ne s’était rien passé.

Leurs sens enivrés aux vapeurs d’essence

Sans interdits ils perdent toute décence.

Patinent en déclenchant l’embrayage.

Sans retard à l’allumage,

 

Et sa petite japonaise

L’emporte vers les cimaises

Quand son long tuyau se glisse

Dans son petit orifice.

Il s’empresse de la remplir,

Elle glougloute de plaisir ;

Puis se racontent des histoires

Quand le type paye au comptoir.

 

I

Mais un soir alors qu’il avait trop bu

Le conducteur lui a foncé dessus :

Dans un fracas de tôles froissées

Les voilà tous les deux encastrés.

Ils s’enlacent tendrement et s’embrassent

Durant le long trajet jusqu’au casse.

Sont si intimement emmêlés

Qu’on n’peut les séparer.

Lui et sa p’tite japonaise

Soudés comme une synthèse

D’une compression de César

Associant l’amour et l’art.

Inséparables, il me semble

Qu’ils pourront rouiller ensemble.

Se retrouvent ainsi liés          

Pour une longue éternité.

 

 

Avec sa petite japonaise        

Et ses deux phares de braise

Qui le met toujours à l’aise

Permanent Vendredi 13

Unis comme une synthèse

L’un sert à l’autre de prothèse

Ainsi prend la mayonnaise

De cet amour bien balèze

Même les quatre roues dans la glaise

Ne ressentent aucun malaise

Et s’envolent vers les cimaises

Comme un doux chant de Joan Baez

Mais j’n’ai plus de rimes en « aise »

Et ne chante que des fadaises           

Il faudrait que je me taise     

Avant de sucrer les fraises 

 

Laï Laï Laï …

© 2023 by Tyler Reece. Proudly created with Wix.com

  • Twitter Clean
  • Facebook Clean
  • White Instagram Icon
  • SoundCloud Clean
bottom of page